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De : C. HAMON - BREIZ EUROPE                                                   Bruxelles Décembre 2007

Objet : Assouplir la Directive Nitrates ? Une majorité du PE l’exige désormais

De façon quasi-anodine dans un rapport fort sur la conditionnalité des aides, le Parlement Européen (PE) a adopté à une très large majorité (650 voix sur 785 députés) lors de sa session plénière mi-décembre à Strasbourg une nouvelle orientation sur le devenir potentiel de la directive nitrates.

Tant le rapport que la communication officielle diffusée par l’institution soulignent que la simplification, l’harmonisation et l’amélioration du régime de conditionnalité doivent être un processus permanent. Les Parlementaires souhaitent que la Commission fasse tous les deux ans rapport des progrès réalisés et proposent d’éventuelles modifications à apporter pour « résoudre les goulets d’étranglement au niveau des contrôles ou pour revoir la directive nitrates ».

1- Une démarche progressive, de plus en plus convergente :

-      Depuis 1999, date de la première dérogation au Danemark, les dérogations conditionnelles à la directive Nitrates se sont multipliées, pour arriver aujourd’hui à l’état suivant :

  • le Danemark, jusqu’à 230 kgs/ha (3ème renouvellement d’une dérogation trisannuelle),
  • l’Autriche,                      230 (renouvellement non demandé)
  • la Wallonie (Belgique),    230
  • les Pays-Bas,                 250
  • l’Allemagne,                   250
  • l’Irlande,                        250
  • l’Irlande du Nord           250
  • et la Flandre (Belgique), autorisée à aller jusqu’à 350 kgs/ha et à exporter le trop plein.

L’Italie et l’Espagne qui, comme tous les autres pays ci-dessus, ont été condamnés par la Cour de Justice pour non-respect de la Directive Nitrates, sont toujours en négociations avec les services de la Commission concernant leur mise en conformité avec les règles européennes et donc, éventuellement, pour la définition de dérogations.

Ces dérogations portent sur l’obligation de moyens (réduction de la pression à la source) en vue du respect d’une obligation de résultat (50mg/l) définie précédemment dans la réglementation européenne en 1975 (directive sur les eaux superficielles) et elle-même soumise aussi à de nombreuses dérogations, si l’on se réfère aux dernières synthèses disponibles de la Commission.

Cette nécessité de revoir la directive est confirmée par le député en charge du rapport d’initiative du PE sur le biogaz, qui constate que la mauvaise application de ce texte, parmi d’autres, est de nature à compromettre le développement des installations de biogaz en Europe.

Parallèlement, de façon tout aussi officielle, plusieurs parlementaires continuent d’interroger la Commission sur la directive Nitrates. Les questions les plus récentes (2006/2007) venaient du Pays-Bas, du Royaume-Uni, d’Irlande et d’Allemagne avec, pour thème récurent, les divergences de mise en œuvre !

La dernière en date, posée par Ambroise Guellec, porte la salve un peu plus loin encore. Sur la base des multiples dérogations dont la dernière en date pour la Flandre, il est demandé à la Commission :

-         D’une part comment elle peut « justifier les positions prises et (…) garantir qu'elles n'ont pas entrainé de distorsions de concurrence inadmissibles entre agriculteurs européens? »

-         D’autre part, si « des traitements aussi disparates » ne devraient pas « conduire à réviser la directive nitrates afin de rétablir l'équité sur l'ensemble (…)de l'Union européenne ? »

1- Remarques et commentaires :

-            A M. Guellec, la Commission, comme dans ses réponses antérieures, tentera une nouvelle fois de confirmer sa politique : une politique dérogatoire contribuant à respecter l’esprit de la politique environnementale !

-            Cette base réglementaire de plus en plus diffuse et variée ne peut que contribuer à générer des divergences importantes entre les agriculteurs, y compris sur un même territoire. Comment justifier auprès d’eux et comment expliquer à l’ensemble de la collectivité, dans le cadre de l’éco-conditionnalité des aides, que pour tel producteur le versement des aides est conditionné au respect de 170, mais pour tel autre, soit 230, soit 350…. Où est la cohérence ? les Parlementaires ont mille fois raison de s’insurger contre ces dérives !

-            En l’attente de l’entrée en vigueur (2009) du traité de Lisbonne, le PE dans un rôle purement consultatif, n’a aucune chance pour faire modifier le contenu de la proposition initiale de la Commission sur la conditionnalité des aides qui sera adoptée par le Conseil début 2008, sous présidence Slovène. Cependant, cette inclusion très ciblée et très précise des députés européens sur la directive nitrates est sans appel et démontre le potentiel et la volonté de l’assemblée parlementaire ! Une volonté qui ne pourra s’appliquer et se mettre en œuvre qu’à une seule condition : l’introduction de la Directive-Cadre sur l’Eau (DCE) en lieu et place de la directive nitrates dans le champ de l’éco-conditionnalité !

2- Conclusions

Face

-      au risque d’extension à toute l’agriculture bretonne du remède déjà appliqué aux bassins versants en contentieux afin de prétendre résoudre tous les problèmes, tel que cela s’annonce dans la négociation du SDAGE;

-      à l’échéance de 2009 fixée pour le dossier bassins versants, dont tout le monde doit reconnaître qu’elle ne sera pas respectée : plus de 9 mois après l’engagement pris devant la Commission, nous ne sommes toujours pas en mesure de présenter un diagnostic individuel complet !

-      à la stratégie de nos partenaires européens sur l’utilisation et la manipulation des règles européennes pour éviter toute remise en cause fondamentale et drastique de leur activité ;

il s’avère urgent pour la France de définir une ligne de conduite et une stratégie sur la politique de l’eau !


Sans doute Breiz Europe a-t-il été trop avant-gardiste en annonçant dès 2003 à ses adhérents la fin à venir de la directive Nitrates. Désormais, le doute ne semble plus guère de mise, dans ses dispositions actuelles, sans recours aux dérogations, le texte apparaît comme dépassé aux grandes tenants environnementalistes du Nord de l’Europe. Comment l’agroalimentaire breton pourra-t-il dès lors s’organiser si lui-même est limité sur tout son territoire à 140 kgs/ha/an ?

Breiz Europe, à votre service.

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